Une des caractéristiques principales que possèdent les traducteurs, interprètes et les linguistes en général est leur passion pour les langues. La plupart se retrouvent dans ce métier, non qu’ils l’aient forcément choisi dès le départ, mais plutôt parce qu’ils se sont donnés pendant longtemps à l’apprentissage d’une autre langue. Et dans ce long processus, il ressort des découvertes parfois surprenantes qu’insolites. En général, lorsqu’on se met à apprendre une autre langue, ce n’est pas uniquement une acquisition de nouveaux mots ou vocables. On entre en fait dans un nouveau monde, on découvre une nouvelle culture, une façon de vivre et de penser.

Ce parcours devient encore plus intéressant lorsqu’on découvre des ressemblances pour tout le moins improbables entre sa langue et la langue que l’on apprend, surtout lorsque ces deux sont éloignées par leurs géographies. C’est le cas que j’ai rencontré dernièrement depuis que j’ai commencé à m’intéresser au… japonais. Et là, je réalise, quoiqu’encore au début de mes leçons, qu’il y a ici et là des similarités auxquelles je ne pouvais aucunement m’attendre.

Le nombre de langues dans le monde est difficile à déterminer. Une étude de 2009 fait état de l’existence de plus ou moins 7000 langues (www.sil.org). Dans le domaine linguistique, les langues sont regroupées dans ce que l’on appelle ‘familles de langues’. Bien que presque toutes les langues du monde se retrouvent presque dans une famille donnée (https://fr.wikipedia.org/wiki/Famille_de_langues), il existe de rares exceptions où une langue n’est affiliée à aucune famille. C’est le cas notamment du japonais, en tout cas selon les experts en la matière.

Sauf que depuis que je m’y suis mis, j’ai relevé quelques similitudes avec deux de nos langues bantoues. C’est notamment le Swahili et le Tshiluba. Le Swahili, en tout cas celui du Sud de la RDC, est ma langue maternelle. Il est un peu différent de celui de l’Est du pays ou celui de la Tanzanie ou Kenya. Le Tshiluba est la langue de mes parents, que je comprends mieux plus que je ne le parle. Mais ces deux langues ont des traits assez étonnants avec le japonais.

 

Tenez ci-dessous quelques comparaisons :

  • Ototo (Jap): petit frère ; vs. Mutoto (Swh): enfant, petit.

 

  • Anasemasu (Jap): je/tu/il parle(s) ; vs. Anasema (Swh): Il parle.

 

  • Jii (Jap): Heure ; vs. Jiiba (Tsh): Heure

 

  • Ni: La particule ‘ni’ en japonais indique la destination. Exemple : Tokyo-ni ikimasu: Je vais à Tokyo. Cette particule est exactement la même qu’en Swahili. Exemple : Nahenda soko-ni. Traduit : Je vais au marché (soko).

 

  • La même particule ‘ni’ en japonais peut, en plus de la destination, indiquer aussi la situation. Des expressions comme koko-ni, soko-ni, ou asoko-ni indiquent la situation : ici, là, là-bas. Par exemple : koko-ni wa pari-desu: ici c’est Paris. En Swahili, ‘nyumba-ni’ veut dire à la maison. Ainsi, nous avons ‘soko-ni’ (au marché), ‘masomo-ni’ (à l’école), et même ‘kisanga-ni’ (sur l’île).

 

  • En japonais, Nan ou Nani est utilisé pour dire ‘qui’ ou ‘quoi’. Il est similaire au ‘nani’ que l’on utilise en Swahili pour ‘qui’ ou ‘nini’ (quoi);

 

  • La langue japonaise se construit avec des syllabes. Certaines de ces constructions syllabiques sont similaires dans leurs écritures. Exemple, la Ligne de H (H Line) et celle de P (P Line).

は ha, ひ hi, ふ fu, へ he, ほ ho – ぱ pa, ぴ pi, ぷ pu, ぺ pe, ぽ po. HU se prononce ‘fu’.

Le terme Nippon (japonais) vient en fait de nihon qui signifie Japon.

 

Cette ressemblance de P et H en japonais s’apparente à celle retrouvée en Tshiluba, où les sons en P peuvent être substitués en H sans problème.

Ex : Lupepela (vent) peut aussi être prononcé luhehela. Un mot comme ‘Kapya’ (feu) peut être prononcé avec le P aspiré comme dans le son ‘FU’ (ふ);

 

  • Même chose avec le ‘K line’ et le ‘G line’ du japonais qui presque ont les mêmes caractères. En fait les lubaphones sont souvent connus pour substituer les sons du K et G, à l’instar de ‘Gare’ prononcé ‘Kare’, ainsi de suite.

 

  • Le son nasal ‘ng’ est prononcé de la même façon par les japonais que les Baluba, comme par exemple dans les noms KAPINGA, MUJINGA ou ILUNGA !

 

Voilà-là quelques similarités bien étranges. Et que dire des patronymes ? Certains japonais ont des noms, on dirait des congolais !

N’est-ce pas à raison qu’il est dit que tous les hommes proviennent d’un seul sang ?

Et vous, quelles ressemblances avez-vous relevées entre les langues que vous apprenez ou les cultures où vous vivez, et les vôtres ? Merci de partager et laisser vos commentaires.